Moi? che n’ai rien à dire, che ne suis pas un poète,
on me fait fenir sur scène, che ne sais pas bourquoi,
car en la zirconstanze, si ch’ai levé le doigt,
c’était chuste pour zavoir où étaient les toilettes !
Maintenant que che zuis là, il faut pas técevoir,
che fais tenter de me faire rimailleur pour un soir,
essayer d’enchaîner quelques alexantrins,
mais che n’ai pas de suchet, et che zuis dans le bétrin..
Che n’ai pas d’obinion sur le trou de la Zécu,
encore moins sur la bombe, ou le traité de Maastricht.
Che ne ferai pas, pédant, un exposé sur Nietzsche
ni, confaincu, un cours sur le cours de l’Ecu.
Che n’ai pas de fil boétique qui fous ferait fibrer..
Che bourrai fous barler de ma sœur, de mon chien,
de l’hiffer, de la pluie, du fent, de la rozée,
mais che préfère encore.. ne vous parler de Rien.
Oh ! Che ne serai pas le bremier ! Parler pour ne rien dire,
d’autres l’ont fait afant moi. Debuis des millénaires,
ceux qui pondent nos lois, qui chèrent nos affaires,
dans le chenre lanke de pois, on n’a pas trouffé pire.
Les accros de la tripune, les tripuns du micro,
afec beaucoup d’emphase, avec le ferbe haut,
nous débitent leurs phrases, et foudraient qu’on entende
des propos qui zonnent creux comme une flûte des Andes.
Et puis, c’est soufent long, c’est là le boint kritique :
ils zont plutôt diserts, les chens de la bolitique !
Et tout le monde le sait, depuis Efe et Adam:
plus le discours est long, et moins y’a de choses tetans..
Et chanter pour ne rien dire? Bosez-fous la guestion:
Y a-t-il là matière à une dissertazion?
Dans « che t’aime, moi aussi, tu m’as fait de la peine »:
Toute la Philosophie, dans une chanson d’Hélène..
Il y a aussi nos femmes , nos chéries, les mignonnes,
qui aiment à bafarder des heures au téléphone ,
avec pelle-maman, ou avec la copine,
pendant que les choux-fleurs prûlent à la cuisine!
Alors bourquoi pas moi? La parole est facile:
on peut tenir des heures, za n’est pas tifficile,
avec cet afantage: quand on n’a rien à dire,
notre auditoire au moins, ne peut nous contredire!
Fuyez, n’écoutez pas , quand sous un flot de paroles,
fous subissez l’assaut d’un orateur prolixe,
qui se perd en diatribes, et qui prend tous les risques
qu’on lui dise, à la fin, qu’il s’est trompé de rôle.
Alors che m’arrête, là: j’feux pas lasser les chens
D’autant que maintenant, ça defient plus qu’urchent.
Comme il me reste encore à chercher les toilettes,
Che fous laisse la place lipre, amis poètes !